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Quand l’amour est aussi violence...

mercredi 16 février 2005

Arts et spectaclesQuand l’amour est aussi violence... avec L’histoire de l’oie

Gatineau
04/02/2005 Marie-Eve Bouchard
bouchardme@transcontinental.ca

Photo : Rubanus

Les comédiens Yves Dagenais et Alain Fournier, incarnent avec crédibilité le personnage de Maurice enfant et Maurice adulte dans la pièce de théâtre jeunesse « L’histoire de l’oie ».

Rarement, mais parfois le théâtre pour enfants sait aussi aborder des thèmes aussi durs et touchants que la violence. Et c’est avec les bons mots, les bonnes images, les meilleures analogies et une production magnifique que la pièce « L’histoire de l’oie » de Michel Marc Bouchard, présentée les 5 et 6 février, bouleverse les petits comme les grands.

« Je vais vous raconter une histoire que l’on raconte aux enfants une fois qu’ils sont devenus adultes, mais qu’on devrait leur conter quand ils sont enfants. » C’est sur ces quelques mots qui semblent sans importance que s’ouvre la pièce pour les 9 ans et plus, « L’histoire de l’oie ». Pourtant, ils disent tout...

Car la violence faite aux enfants est encore taboue et difficile à aborder. Surtout lorsqu’on en parle aux enfants... C’est par le biais de l’histoire de Maurice et de son amie Teeka, une oie qu’il a apprivoisée, que Michel Marc Bouchard nous plonge dans ce thème peu habituel. Avec son oie, qu’on le voit approcher avec à la fois de l’amour dans ses morceaux de gâteau et de la violence en lui arrachant ses douces plumes, Maurice se construit un monde chimérique.

Teeka partage le monde imaginaire de Maurice. Elle pénètre dans l’univers des humains, voit ces hommes et ces femmes emprisonnés dans des cadres, papote dans une grande mer qui est en fait un bain. Ces découvertes sont d’ailleurs les moments les plus drôles du spectacle.

Maurice est donc Tarzan, ce héros qu’il aime tant. Il est fort et pense pouvoir vaincre le lion. Teeka serait bien prête à jurer fidélité à Maurice-Tarzan en autant qu’il ne lui arrache plus ses plumes et qu’il lui apporte du gâteau à tous les jours. Un peu comme l’enfant qui aime ses parents, malgré tout... Mais entre les griffes du lion, Maurice reproduit la violence qui fait partie de sa vie. Et Teeka en subit les conséquences...

Donc pas de fin joyeuse, juste la réalité de l’enfant qui subit la violence et qui la reproduit parce que c’est ainsi que ça doit être fait. L’histoire de lois. De quoi donner des frissons dans le dos, certes, mais Michel Marc Bouchard arrive à nous faire saisir comment son petit Maurice comprend, agit et subit ses mauvais traitements.

Outre la qualité du texte, qui recèle de véritables petits bijoux d’analogies et de citations clés, « L’histoire de l’oie » brille également par la qualité de sa production. Le travail des deux comédiens, Alain Fournier et Yves Dagenais qui incarnent Maurice, adulte et enfant, est touchant et digne de mention, bien appuyé par la marionnettiste, Patricia Leeper qui sait rendre l’oie presque vivante. Le simple décor où loge deux maisons, une étant la maison-grange de Maurice et l’autre la cabane des oies, recèle en fait des trésors cachés. Cette simple grange de tôle servira de bruitage pour l’orage, puis s’ouvrira pour découvrir en son ventre la salle de bain et la chambre de Maurice.

Même la marionnette de l’oie qui évolue et se métamorphose en cours de spectacle, fait montre d’un grand génie. Sans oublier, la musique qui contribue grandement à l’intensité du spectacle.

Les enfants auront donc de multiples questions au retour de cette pièce. Mais des questions, qui valent la peine d’être abordées. Et comme le souhaite l’auteur de cette pièce, peut-être des petits Maurice oseront-ils en parler ou l’écrire ? « Ça n’éclipse pas l’orage, ça calme la foudre. »

L’histoire de l’oie au Centre national des arts, 53, rue Elgin à Ottawa, les 5 et 6 février à 13h30. Billets disponibles au coût de 11,50$ en composant le 755-1111.