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Parcours de torture pour les accidentés de la route et leurs proches

lundi 23 octobre 2006, par Jeanne HILLION

deux-roues accidentés, accidents de la circulation : victimes deux fois ! !

Le droit français énonce le principe de la réparation intégrale du dommage subi par toute personne victime. Et pourtant, tout le long du parcours, la victime ne vit que victimation et survictimation.


interview de Maître LOMBARD

"Le droit français énonce le principe de la réparation intégrale du dommage subi par toute personne victime.

En pratique ce principe se heurte à la toute-puissance des organismes indemnisateurs qu’ils soient assurés, assureurs ou fonds de garantie.

La réalité est que toute victime doit prouver preuve à l’appui les préjudices qu’elle subit, pertes de salaires, frais exposés, douleurs, destruction des conditions de vie, détérioration de la vie familiale....

Quand se rajoute à cela les expertises médicales auxquelles doit se soumettre la victime, c’est un véritable parcours du combattant qu’elle doit engager, alors qu’elle est seule, fragilisée, diminuée et impuissante face aux toutes puissantes assurances.

L’image de la bataille du pot de terre contre le pot de fer est intolérable.

Notre combat, qui est aussi notre idéal est d’aider les victimes pour qu’elles soient sur un pied d’égalité avec leurs adversaires, qu’ils soient responsables de l’accident ou organisme indemnisateur.

La barre est haute, l’état des lieux au niveau des victimes est le suivant :

- méconnaissance totale de leurs droits face à des organismes indemnisateurs très structurés.

Cette méconnaissance entraîne une réaction craintive ou de confiance aveugle face à l’assureur, de la victime, qui est souvent de surcroît celui de la famille et qu’une relation de proximité s’est nouée avec l’agent.

incompréhension des documents adressés par l’assurance suite à un accident.

Ces documents sont exigés par la loi.

La victime doit les retourner complétés dans un délai bref.

Cette pièce est de nature à recueillir des renseignements d’ordre administratif sur la situation de la victime (état civil, immatriculation au régime des assurances maladie).

Elle constitue un préalable au processus d’indemnisation mais elle met mal à l’aise la victime qui ignore tout de ses tenants et aboutissants.

inquiétude lors des opérations d’expertises médicales.

Elles sont organisées dans un premier temps par les compagnies d’assurances, soit celle de la victime, soit celle du responsable de l’accident.

Leur objet est d’établir une évaluation des blessures et séquelles provoquées par l’accident.

La règle est que la victime se rend seule, parfois accompagnée par un membre de sa famille.

Elle se présente devant le médecin conseil de l’assurance inquiète et confiante à la fois.

Or, les victimes sont dans l’immense majorité des cas malmenées lors des expertises.

L’expert est celui de l’assurance débitrice des indemnités. Il est

mandaté, payé par la compagnie d’assurance, qui est même parfois son seul client. Il ne va pas risquer de le perdre en retenant les taux de préjudice réels.

L’attitude des experts conseils d’assurance est de minimiser les préjudices d’une part d’autre part « d’oublier » certains poste de préjudices.

Les postes de préjudices que sont l’ITT, l’IPP, les souffrances endurées, préjudice esthétique sont répertoriés, mais au lieu de reconnaître la réalité des séquelles présentées par la victime, l’expert aura tendance à minimiser le handicap permanent, la durée de l’arrêt de travail, l’importance des souffrances ressenties ou de l’atteinte esthétique.

L’évaluation des séquelles conditionne directement l’indemnisation des préjudices, de sorte qu’évaluer à 20% un taux d’IPP qui est en réalité de 25% va impliquer une perte financière de l’ordre de 10 000 €.

Le plus lourd en conséquence est la non reconnaissance par l’expert du préjudice professionnel de la victime, qui considère qu’elle est apte à la poursuite de son emploi malgré son déficit corporel.

Cette appréciation se traduit sur le plan de l’indemnisation par la perte d’une somme d’argent correspondante au salaire perdu par un coefficient de capitalisation.

Prenons l’exemple suivant :

une femme, ouvrière agricole âgée de 52 ans. Elle ne peut plus travailler suite aux blessures qu’elle a subies. Elle percevait, avant son accident, un salaire de 1000 € par mois net. Elle doit bénéficier d’une indemnisation de 207.204 € (1000 € x 12 x 17.267 € rente).

Sont également « oubliés » par les experts, les postes de préjudices suivants :

aide tierce personne,

aménagement logement et véhicule

préjudice sexuel,

préjudice d’agrément

préjudice d’affection

Là encore les conséquences financières sont lourdes pour la victime.

l’assistance en aide humaine de la victime est souvent obligatoire à sa sortie de l’hôpital. Une victime dont les deux poignets ont été fracturés ne peut rien faire seule et a besoin d’être aidée pour se lever, se déplacer, se laver, s’habiller, se chausser, se nourrir.....

Ces gestes se font au ralenti pour tenir compte des douleurs ressenties et impliquent au minimum trois heures par jour d’assistance sur une durée de deux mois, soit une incidence de 2 562 € (3 x 61 jours x 14 €).

Pour une victime qui aura besoin à vie d’une aide humaine, l’incidence financière peut s’élever à 2 millions d’€uro.

le coût d’aménagement du logement, véhicule ou achat du matériel (fauteuil) doit être apprécié en fonction de deux critères.

1° : la victime a droit à ce qu’il y a de mieux,

2° : les aménagements doivent être remplacés tous les quatre ou cinq ans.

Donc il faut calculer le coût jusqu’à la fin de la vie de la victime.

Si on prend l’exemple d’un fauteuil roulant à bas prix et celui parfaitement équipé et adapté à la victime, l’incidence financière peut être de 80 000 €.

Le préjudice sexuel et le préjudice d’agrément, préjudices courants sont trop souvent encore omis.

Que dire des préjudices d’affection, d’établissement, jamais abordés par les experts d’assurance.

La partialité des médecins conseils d’assurance ne fait de doute pour personne.

La victime doit le savoir pour se battre et faire valoir la réalité de ses préjudices.

Mais à côté du manque objectif d’impartialité de l’expert, il faut considérer le traitement déplacé, voire inhumain et ignoble réservé à la victime expertisée

La victime lors de l’expertise est placée en situation d’infériorité, et se sent humiliée par des regards, des réflexions, des mises en scènes, (se promener nue face à deux, trois experts....qui de surcroît vont systématiquement mettre en doute ses déclarations relatives aux souffrances, ressenties et au handicap).

La réflexion la plus souvent formulée à l’égard des victimes est « estimez vous heureux d’être encore là, » « ou vous vous en sortez bien, de quoi vous plaigniez vous. »

Le pire n’est il pas les apartés entre les médecins conseils devant la victime, qui ressent, l’existence d’une connivence entre eux contre elle.

Ce sentiment est encore accru lorsque la victime ne peut obtenir la communication du rapport d’expertise qui reste une pièce interne aux compagnies d’assurance.

Pour défendre ses intérêts face au système mis en place et parfaitement rodé, par les assureurs, il reste à la victime la solution de saisir le juge d’une demande d’expertise judiciaire.

Celle ci sera ordonnée sans difficultés par la justice, mais il faut savoir que la plupart des médecins experts judiciaires, qui ont donc prêté serment, ont bien souvent été et parfois le sont encore, des médecins conseils d’assurances.

En conséquence, l’appréciation qu’ils feront des séquelles présentées par la victime sera largement inspirée des réflexes minimalistes des pratiques des assurances.

Lors des expertises judiciaires, les médecins conseils des compagnies d’assurance sont toujours présents et ils discutent « le bout de gras », rognent sur chaque préjudice, obsédés par le soucis de faire économiser des indemnités à leur mandante.

Parfois, l’expert judiciaire se laisse confondre par la virulence de certains médecin conseils, qui argent d’une plus grande expérience et connaissance territoriale des pratiques d’indemnisation.

L’expert judiciaire, lorsqu’il est praticien hospitalier est de fait plus éloigné du quotidien indemnitaire.

En l’état actuel des lois et des moyens existants, les seules solutions consistent à :

mieux informer les victimes de leurs droits,

mettre à leur disposition les coordonnées des médecins conseils de victimes et d’avocats spécialisés qui seront en mesure de leur expliquer le processus d’indemnisation, défendre leurs droits face aux organismes indemnisateurs

entourer dans le cadre d’une structure associative la victime pour l’aider à supporter le parcours du combattant qui est son droit à une juste indemnisation.

La définition des responsabilités est le préalable à l’indemnisation des victimes.

le droit à indemnisation des victimes d’accidents de la circulation est régi par la loi du 05.07.1985 dite Loi Badinter, votée pour faciliter le processus d’indemnisation au profit des victimes.

La loi opère une distinction catégorique entre les victimes passagers transportés et les victimes conducteurs.

l’indemnisation des victimes passagers transportés ne soulève généralement aucune difficulté sauf à supposer la situation marginale du passager qui prend les commandes du véhicule et provoque un accident.

l’indemnisation des victimes conducteurs, prévue par l’article 4 de la loi est conditionnée à une absence de participation fautive dans le processus accidentel.

L’article 4 énonce : la faute commise par le conducteur victime à pour effet de limiter ou d’exclure les dommages qu’il a subis.

L’appréciation des causes et circonstances de l’accident résulte des données récupérées sur les lieux de l’accident : mesures, photographies, prélèvements, auditions de témoins..... et sont contenues dans le procès verbal dressé par les services de police ou gendarmerie appelés sur les lieux.

Les conclusions du procès verbal vont conditionner la décision de poursuite du Procureur de la République.

Les nombreux cas que nous avons eu à traiter montrent un traitement insuffisant, carencé, voire orienté des diligences opérées par les services d’enquête.

Sans suspecter l’existence de liens de proximité entre la gendarmerie d’une bourgade et certaines personnes impliquées dans un accident, on a dû constater des situations absolument aberrantes, la pire étant la rédaction d’un double procès verbal de police pour un même accident avec des conclusions totalement opposées quant aux responsabilités encourues.

Nous avons eu également à connaître le cas d’un piéton, trouvé mort en pleine nuit sur le bas côté d’une route nationale pour lequel, le médecin légiste avait conclu à un décès suite à une crise comitiale pour le seul motif qu’il s’était mordu la langue.

En réalité, la famille de la victime avait pris l’initiative de se rendre sur les lieux de l’accident dès le lendemain matin pour prendre des photos de la route sur laquelle étaient nettement visibles des tâches de sang provenant du corps de la victime qui avait été projeté sur le côté sous l’effet du choc accidentel avec une voiture identifiée par la suite.

Le conducteur de ce véhicule était le maire de la commune où avait eu lieu l’accident.

La liste est longue des anomalies retrouvées dans la rédaction des procès verbaux d’accidents.

Les conséquences sont dramatiques pour la victime ou sa famille, puisqu’elles sont de nature à les priver de tout droit à indemnisation.

Face à cette situation, il ne faut pas hésiter à avoir recours à un expert en accidentologie qui viendra sur place après l’accident et procèdera à une reconstitution en relevant l’ensemble des circonstances qui ont participé à l’accident.

En aucun cas, il ne faut admettre les conclusions hâtives, prises après un examen succinct du procès verbal par le parquet, soient de poursuite soit de classement sans suite.

la victime ou sa famille ne doit pas hésiter à interroger le Procureur en charge du dossier et leur suggérer le recours à des investigations supplémentaires (auditions témoins, expertises).

Il faut se battre pour que les victimes ne soient plus tenues à l’égard de l’enquête pénale menée suite à l’accident et qu’elles puissent être informées dès le départ des causes de l’accident.

Actuellement certains parents dont l’enfant est décédé des suites d’un accident ne sont même pas informés des causes du décès et se posent pendant des mois la lancinante question des circonstances de la mort de leur enfant.

La victime doit demeurer active dans le traitement de son accident.

L’effort, il est vrai, est colossal. Sinon elle ou sa famille sera immanquablement lésée."

Pour être aidé par des personnes compétentes et être suivi ou orienté

Association REGAIN

2 rue KERGROES
29300 GUILLIGOMARC’H

adresse postale ne pas se présenter