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Les enfants face aux violences du quotidien

dimanche 31 octobre 2010, par Jeanne HILLION

LA NON-VIOLENCE :

Compétences relationnelles et sociales

Le développement des compétences psychosociales telles que la négociation, la résolution de conflits, la pensée créatrice, la capacité à prendre des décisions, à faire face aux évènements, les relations interpersonnelles et la communication, sont des éléments importants pour permettre un mieux-être individuel et collectif. Les recherches conduisent aux mêmes conclusions pour ce qui concerne la prévention des violences. Les phénomènes de violence résultent souvent d’une absence de parole.

Le développement de programmes adaptés aux différents âges permet de mettre à la disposition des professionnels des outils de socialisation. Comme le note le Haute Comité de la Santé Publique (1) :

"L’apprentissage de la confiance en soi dès la petite enfance et du respect de l’autre dans des relations de non-violence sont le fondement d’une réduction des violences les plus courantes . (...) Sans culture, l’être humain ne voit en l’autre qu’un étranger, un ennemi qu’il faut dominer et contre lequel il faut se défendre. Si, comme nous l’avons montré, la violence est un problème de santé publique, la non-violence est une affaire de civilisation et de citoyenneté."

(1) "Violences et Santé", rapport du Haut Comité de la Santé Publique (HCSP), 2004, 126 p.

Editorial

Au-delà des faits de délinquance médiatisés

Les enfants face aux violences du quotidien

L’étude publiée en avril 2010 dans la revue Pediatrics (1) a relancé en France le débat sur les châtiments corporels. Le Docteur Catherine Taylor, chercheure en santé publique aux États-Unis, y montre que les enfants qui reçoivent des fessées à trois ans se révèlent généralement plus agressifs à l’âge de cinq ans. Les claques et les fessées n’aident pas l’enfant dans ses apprentissages ; elles conduisent même au résultat inverse. Il est urgent qu’une loi abroge les châtiments corporels et prône une éducation sans violence en incitant les parents à se défaire d’habitudes souvent héritées de leur culture et de leur éducation, pour privilégier la fermeté bienveillante et les sanctions éducatives.

L’éducation non-violente invite à réfléchir à la façon dont nous communiquons avec les enfants, dans la famille, à l’école, dans le club de sport… Pour illustrer la campagne « Élever son enfant sans violence », menée en 2009 par la Fondation pour l’Enfance et la Ville de Romainville (93), une affiche présentait un nounours avec cette phrase : « Le petit Paul a toujours mal au ventre depuis que sa mère le traite de nul ». Les mots, en effet, peuvent avoir des conséquences sur l’estime de soi et sur confiance de l’enfant, surtout quand ils viennent de ses parents : « C’est donc vrai, je suis nul, je ne vaux pas la peine d’être aimé… ».

En France, l’école aussi donne « mal au ventre » aux enfants. Peter Gumbel, journaliste anglophone basé à Paris, indique que « 71 % des élèves sont régulièrement sujets à l’irritabilité, 40% se plaignent d’insomnies fréquentes et un élève sur quatre a mal au ventre ou à la tête une fois par semaine… » (2). L’auteur s’interroge : « pourquoi la France est-elle le seul pays au monde à décourager ses enfants au nom de ce qu’ils ne sont pas, plutôt qu’à les encourager en vertu de ce qu’ils sont ? ». La culture d’évaluation maintient les enfants sous pression et enfonce les plus faibles plutôt que les aider à se relever. L’échec scolaire et le sentiment d’injustice qui en résulte exacerbent les tensions et agissent sur le climat d’école.

La violence, selon le Code pénal, c’est tout ce qui porte atteinte à l’intégrité physique et psychique de la personne. Les violences du quotidien, plus difficiles à déceler que la délinquance médiatisée, sont tout aussi traumatisantes. Quand un enfant se sent humilié par un geste, une parole, une bousculade, une insulte… il éprouve un sentiment de violence. Et cette violence peut entamer son bien-être, sa faculté d’apprentissage et même sa capacité à établir des relations sociales normales. Toutes les formes de violence à l’égard des enfants doivent être combattues, par une approche éducative et particulièrement par le renforcement des compétences relationnelles et sociales, chez les enfants comme chez les adultes (3). L’éducation à la non-violence est le meilleur moyen de prévenir les violences du quotidien.

(1) http://pediatrics.aappublications.org/cgi/content/abstract/peds.2009-2678v1

(2) « On achève bien les écoliers », Peter Gumbel, Ed. Grasset, 2010.

(3) Recommandation Rec(2006)19 du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur les politiques visant à soutenir une parentalité positive : « Les gouvernements devraient élaborer (…) des actions d’accompagnement spécifiques pour assister [les parents] dans des situations de vie éprouvantes, dans la résolution de conflits et la gestion de la colère, en recourant à des approches non violentes et à des techniques de médiation » (www.coe.int/t/transversalprojects/children/violence/Default_fr.asp)

Editeur : Non-Violence Acualité

Année d’édition : Novembre-décembre 2010

Nombre de pages : 28

Code NVA : 0401-313

Prix : €6.00

Extrait

Entretien avec Cécile CARRA

Violences en milieu scolaire

Comment les élèves perçoivent-ils la violence à l’école ?

Sociologue, professeure des universités, Cécile Carra enseigne à l’IUFM, école interne de l’Université d’Artois. Elle dirige également l’équipe de Recifes, Recherches en Éducation Compétences Interactions Formations Éthique Savoirs. Elle est l’auteure de « 

Violences à l’école élémentaire », Ed. PUF, 2009.

NVA - Comment définiriez-vous la violence en milieu scolaire ?

Cécile Carra - C’est souvent à travers le prisme de l’adulte que se construit une représentation de la violence en milieu scolaire. Cela ne dit rien de la façon dont les enfants la vivent, quelle part elle occupe dans l’expérience scolaire et dans la sociabilité enfantine. Il faut faire la différence entre les violences très graves, mais heureusement rares, dont on parle dans les médias, et la violence de tous les jours, partie immergée de l’iceberg. Lorsqu’on enquête auprès des enseignants, ce ne sont pas d’abord les violences médiatisées qui sont mises en avant, mais les petites agressions répétées du quotidien, et qui minent le climat des établissements, comme les attaques verbales entre les élèves. Au collège, les élèves sont les principaux acteurs de violence, mais aussi les principales victimes. La violence a une dimension relative et relationnelle, d’où la difficulté d’enregistrer des faits qui peuvent être considérés comme violents par le chercheur mais pas par les acteurs concernés.

De plus, les représentations de la violence évoluent dans le temps.

NVA - Comment avez-vous mené vos recherches ? Comment évaluer le niveau de violence perçu ?

Cécile Carra - Nous avons constitué un échantillon représentatif des écoles élémentaires du département du Nord de la France. L’échantillon a été construit en fonction de trois grands critères : le classement des écoles (« ordinaire », « éducation prioritaire », « zone violence »), leur taille et leur répartition géographique. Nous avons choisi des écoles présentant des critères similaires pour permettre des comparaisons. Par exemple, des écoles situées dans le même réseau d’éducation prioritaire ou implantées en banlieue… Cet échantillon comprenait 31 écoles. Les questionnaires ont été renseignés durant l’année scolaire 2003-2004 auprès d’élèves du CE1 au CM2 et de leurs enseignants. Nous avons ainsi recueilli plus de 2000 questionnaires élèves et une centaine de questionnaires enseignants.

Nous avons observé que la qualification des actes de violence dépend de la place de l’enquêté dans l’appareil éducatif et de bien d’autres facteurs comme l’âge, le type d’établissement, les relations avec les pairs, et surtout les difficultés scolaires et sociales. Plusieurs indicateurs, dont un « score violence », ont été construits pour mesurer le climat de violence à partir de la violence perçue, agie et subie, autrement dit que ce soit comme victime ou comme auteur.

D’autres indicateurs nous ont permis de mesurer différentes composantes du climat : le climat relationnel relatif au règlement, le climat éducatif, le climat de justice et le climat de travail. Ces enquêtes de victimation révèlent que le vécu des élèves de primaire est fortement marqué par les violences entre pairs comme les bagarres. Dans le secondaire, les élèves font davantage référence aux violences verbales. Les enseignants, quant-à-eux, font référence à des transgressions du domaine conventionnel : bavardage, réplique, contestation…

NVA - Les enfants et leurs enseignants n’ont donc pas le même vécu et la même perception de la violence…

Sommaire

• Les enfants face aux violences du quotidien, Édito

• Comment les élèves perçoivent-ils la violence à l’école ? - Entretien avec Cécile CARRA

• La cour de récréation, un espace social structuré par des rapports de pouvoir, par Cécile Carra

• Enquêtes de victimation - Questions aux victimes et aux auteurs de violences, par Éric DEBARBIEUX
Éric Debarbieux est directeur de l’Observatoire international de la violence à l’école et professeur en sciences de l’éducation à l’université de Bordeaux-II. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur la violence en milieu scolaire et notamment « Les dix commandements contre la violence à l’école » (Ed. Odile Jacob, 2008). Depuis avril 2010, il préside le comité scientifique des États généraux de la sécurité à l’école.

Les enquêtes de victimation, permettent de mieux cerner la réalité de la violence en milieu scolaire. Quel est l’historique de ce type d’enquêtes ? Nous avons demandé à Éric Debarbieux de nous apporter quelques précisions. Il nous donne également son sentiment sur les retombées des États généraux de la sécurité à l’école dont il préside le Comité scientique.

•Consultation nationale : La DÉFENSEURE DES ENFANTS interroge les jeunes sur les violences

Dominique Versini est Défenseure des enfants

(www.defenseurdesenfants.fr).

A l’occasion du 20e anniversaire de la Convention internationale des droits de l’enfant, La Défenseure des enfants a lancé une grande consultation nationale auprès des jeunes sur les questions de société qui les concernent et qui interrogent les adultes. Dix forums thématiques portant sur autant de droits fondamentaux ont été organisés entre mai 2008 et août 2009. Les adolescents ont apprécié cette méthodologie de travail en ateliers qui correspondait à leurs attentes d’une parole libre dans un cadre clairement délimité.

Chaque atelier a présenté des propositions. Nous vous proposons ici des extraits du chapitre réservé aux violences.

• C’est quoi la violence au collège ?, par Génération Médiateurs

• Les 16 propositions des jeunes face aux violences

• La violence, d’une culture à l’autre, par Gilles VERBUNT
Gilles Verbunt est docteur en sociologie, spécialiste de la dimension interculturelle dans les apprentissages et le travail social. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet et notamment : « La modernité interculturelle. La voie de l’autonomie », Ed. L’Harmattan,

2006 ; « La question interculturelle dans le travail social », Ed. La Découverte, 2e édition 2009.

La violence est souvent une tentative périlleuse de mettre fin à un conflit ou d’imposer son pouvoir à l’autre. Il arrive aussi qu’elle soit la conséquence indirecte d’une situation ou d’une action. Faute de pouvoir l’éradiquer, toutes les sociétés ont établi des codes pour en réguler l’usage. C’est la culture qui va dire dans quelles situations la violence est tolérée, qui peut s’en servir et quelles sont les formes autorisées.

• Comprendre les manifestations émotionnelles violentes du petit enfant, par Marie GARRIGUE ABGRALL

Marie Garrigue Abgrall a été éducatrice de jeunes enfants dans l’Unité Petite enfance et Parentalité Vivaldi à l’Hôpital de La Pitié-Salpêtrière à Paris. Elle est maintenant formatrice aux métiers de la petite enfance à « L’Horizon », centre de formation aux métiers de la Petite enfance, à Malakoff (92). Docteure en philosophie pratique, elle est l’auteure de « Violences en petite enfance, pour une prévention opportune », Editions Erès, 2007.

Interroger directement les enfants sur la violence est certainement une voie intéressante pour les aider à prendre conscience de celle qui les entourent, ou de celle qu’ils produisent éventuellement et de recueillir l’expression des émotions qu’elle suscite. Cela peut constituer un point de départ dans le dialogue et l’échange pour les accompagner vers des stratégies de protection, d’évitement de celle-ci ou de médiation. C’est difficilement possible avant l’âge de 4 ou 5 ans, les 3 premières années conduisant l’enfant à la constitution de son identité individuelle et au seuil de l’accès au « Je »…

• Écoute empathique : Diminuer le niveau de violence dans notre quotidien, par Roseline ROY - canadienne, psychothérapeute, formatrice à l’animation d’ateliers de communication parents-enfants, traductrice des livres d’Adele Faber et Elaine Mazlish.

Diffusion en France des livres de Faber/Mazlish : www.latelierdesparents.fr et www.nonviolence-actualite.org

Nous ne partageons pas tous la même définition de ce qu’est la violence. Et quand arrive le moment de chercher des solutions face aux problèmes de violence, nous avons tous des solutions bien différentes à proposer. Pour ma part, je recherche des solutions qui vont dans le sens de ce qui m’est familier puisque mon travail consiste à faire connaître l’approche d’Adele Faber et d’Elaine Mazlish sur la communication entre les parents (ou les adultes) et les enfants.

• Ressources

• Livres

• Bloc-notes et offres de formation

• Des jeux coopératifs pour Noël

• Collection Pratiques de non-violence

• Bulletin d’abonnement

• Enquête NVA

• La chronique de « l’Autrement dit »


Spécialisé dans la prévention des violences de proximité (famille, école, quartier, vie sociale et professionnelle…), NVA a pour objectif de répondre aux demandes des particuliers et des institutions, en recherche de documentation, d’outils, de contacts ou de formations, sur les compétences relationnelles et sociales : la communication, l’écoute, la gestion des conflits, la médiation, l’action non-violente, la coopération…